Les 24 h de Grenoble vécus par Gilles.

Publié le par Gilles

L'idée qui me trotte dans la tête c'est faire les 24h de Grenoble dans 10 jours....

Voila comment c’est terminé mon séjour en Grèce après mon échec au bout de157 km à la Spartathlon.

Arrivé A Grenoble dans la nuit du mardi 28 au mercredi 29 septembre, je me dis : « Si demain j’arrive à courir je fais les 24 h00 de Grenoble ».

C’est donc incognito, après quelques heures de sommeil et une matinée de boulot, que je fais un barrage du D4 en  1h07. C’est trop rapide presque 12km/h, mais je n’ai pas mal à mon genou. C’est bon je vais m’inscrire aux 24h00. J’ai une plaquette dans mon bureau. Manque de bol les inscriptions sont closes. J’envoie un mail à Philippe pour avoir les coordonnées de Piero. Philippe, toujours aussi rapide que l’éclair, me renvoie l’adresse mail de Piero. Je rédige, dans ma plus belle prose un mot à Piero, l’organisateur des 24h00, en lui expliquant que je viens de me planter à la Spartathlon et que j’ai trop la caisse pour ne pas tenter les 24h00 de Grenoble. Le soir même Piero me téléphone en me disant pas de pb. Je lui donne mon pédigrée et je suis inscrit en directe. Bon ce n’est pas tout maintenant il va falloir assurer. Jeudi matin, merde j’ai mal à la gorge. Malgré ma gorge en feu, le vendredi je refais un barrage avec Fred que je bassine comme pas possible pour qu’il vienne faire mon modérateur de vitesse sur le 24h00. Sortie encore rapide 11,5km/h. Repos samedi, et dimanche encore une petite sortie de 10 bornes, avec le nez qui coule. Cette fois la vitesse est à peine plus de 10km/h. Le mardi 5 octobre matin j’avais un rendez vous à l’hosto pour un petit bouton de rien du tout.

 « Vous avez un Cancer. Biopsie pour savoir quel type, résultats le 20 octobre vous rentrez le 21 à l’hôpital je vous opère le 22 vous sortez le 25. Vous aurez une grosse cicatrice je vous préviens. Ensuite on verra en fonction de ce que l’on a trouvé. »

L’ambiance est planté le rhume oublié. Je retourne au boulot avec un gros pansement sur la tête et un coup de massue derrière les oreilles. Bon et maintenant je fais quoi  avec cette Nouvelle ? Ben il y a 24 h00. Hier je ne savais pas ce que j’avais et j’allais bien. Donc aujourd’hui je vais bien et je vais à bach à midi. 3 grands tours et un petit tour avec Philippe. Super vitesse un peu moins de 10km/h. Les réglages se précisent.

Le mercredi, encore un dernier réglage avec Franck et Fred, qui a fini par s’inscrire. Merci Monica. Le réglage commence à me plaire 10km/h. Cette vitesse gonfle un peu Fred qui fera une sortie un peu plus longue.

Les nuits sont un peu perturbées je pense à la nouvelle apprise mardi. Je ne pense pas vraiment au 24h00. Mais c’est certain j’irai. Par sécurité je ne travaille pas le  vendredi après midi pour faire la sieste. Mais je n’arrive pas à dormir. Le soir je prépare mon sac, ma caisse avec ma potion magique. Je vais avec Josselin chercher mon dossard et repérer les lieux. Je retrouve mes deux escargots Philippe et Fred motivés comme pas possible. Nous définissons la stratégie pour la salle de repos, et nous renseignons sur le sens du parcours. En fait peu importe le sens il faudra y aller…. La distance exacte ne sera donnée que le jour de la course.  Est-ce 1043 mètres, 1049 mètres Tout cela est très important pour mettre le bipeur à 10,2km/h !

 Je récupère mon dossard et deux badges pour les accompagnateurs. Un sera pour Joséphine et l’autre pour le cas où quelqu’un vienne :  Alain, Hubert ? Les trois escargots ne s’attardent pas dans la patinoire, transformée pour l’occasion des 24h. Fred a pris une chambre à l’hôtel pour se conditionner et arriver guerrier le lendemain. Philippe et moi regagnons chacun nos pénates. La soirée se passe normalement pour moi, avec mes 4 enfants et Joséphine. Certes cela sera pâtes au repas mais, cela mis à part, je n’ai pas l’impression d’être à la veille d’une grosse course. La nuit sera assez calme et je me force à rester au lit le plus possible le matin.

7h je sors de la chambre, me prépare un thé plus du gatosport chocolat. Ça y est je suis dans la course. Je mets mon tee-shirt orange du cross de Bresson, mon corsaire, mes booster, le maillot du racing. Quelles Chaussures ? Mizuno ou newbalance ? Du sparadrap sur les seins. Une bise à mon épouse et je prends la voiture direction le parc Mistral. L’organisation a tout prévu. Nous avons un parking réservé pour les coureurs à quelques mètres du ravitaillement.  Des tables protégées par des tentes sont mises à notre disposition. Je pose ma caisse avec ma potion, mes sportenines et deux trois conneries. Je vais ensuite réserver un lit dans la salle de repos. Fred et Philippe ne sont pas encore sur les lieux. Je réserve 3 lits à proximité les uns des autres en posant des affaires dessus. Malin comme pas 2 je prends mon sac et un autre compétiteur pique un lit. Cela obligera Philippe à s’éloigner de nous d’au moins 5 à 7 mètres. La pression commence à monter. Où sont les toilettes ? Je m’enduis de vaseline sous les bras, les fesses, les cuisses. Du Nok sur les pieds. Prends la casquette et les lunettes. On nous appelle pour la photo de groupe.

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9h45 il faut rejoindre le départ. Putain je n’ai pas reconnu le parcours. Vais-je encore me perdre ? Mes soucis de santé sont oubliés.

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La distance officielle du tour est annoncé à 1044 m. Le top départ est donné.

Partir doucement et ralentir immédiatement. Je compte sur Fred pour me donner le tempo. Philippe à prévu de partir sous la barre des 10km/h je ne vais pas rester avec lui. Premier tour super je ne me perds pas. La route est bien tracée. Je le boucle à une vitesse inferieure à 10km/h.

 Deuxième tour ça y est je suis dans le tempo un peu plus de 10km.h.

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Fred tourne vite puis marche. Nous ne seront pas beaucoup ensemble mais tournerons globalement à la même vitesse avec un décalage de 200 à 300 mètres pendant les premières heures. Nous nous ferons des coucous. Dans les premières heures je bois tous les tours de ma potion magique achetée quelques jours plus tôt chez Brice. Après une heure de course je suis dixième. Je mange un bout.  Après 2 heures tout va bien je m’arrête au stand de ravito. Il est monstrueux et tu as tout ce que tu veux. Je suis 8ème à 43 secondes devant fred. Cependant je n’ai pas la pression. 3h de course toujours régulier l’écart avec fred est constant Je suis 7éme fred 8éme. Philippe 43 éme mais il est parti prudemment. 4h00 de course toujours même rythme je suis 6éme. L’après midi, la chaleur arrivent ainsi que les supporters. Merci à vous. Cela fait du bien au moral de voir les copains. Je passe un badge accompagnateur à Alain et il va direct au stand ravito. Non pas pour se goinfrer mais pour me préparer ce que je lui demande. Ainsi, jusque tard dans la nuit il me fournira, de l’eau de la potion magique, du coca, de l’eau gazeuse de la soupe des pâtes… les tours s’enchainent et j’ai toujours la même vitesse. 7ème heure je suis avec Fred, je prends la 5éme place fred la 6ème. Vers 17h30 Joséphine vient avec les enfants. Cela me fait un plaisir immense. Elle s’occupera de mon ravito et les enfants m’accompagneront un peu. Puis la nuit arrive, les enfants et Joséphine rentrent manger, la vitesse reste constante. 10h00 de course, les 100 km sont passés. Alain est toujours présent. Les enfants et Joséphine reviennent, cela est bon pour le moral.  Florent les rejoint. Je tourne toujours comme une horloge. 12ème heure 4éme et plus de 120km dans les jambes. Merde ; Fred à jeté l’éponge. Pour moi, tout va bien, j’ai trop la caisse.

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Hubert et Alain assurent mon  ravito. Hub m’accompagne en me donnant des bouts de banane. Le n° 2 est mal et le 3eme est à un tour devant. C’est certain dans moins d’une heure je suis troisième. Alain et les enfants me disent que je vais trop vite. Hubert m’en remet une couche. « Grand Gilles tu as 10h00 pour les doubler ». J’ai vraiment trop la caisse je vais les manger. 14éme heure la vitesse a un peu baissé. Le 3éme est juste devant je vais le bouffer. Les supporters rentrent se coucher. Flo reste pour assurer mon ravito.  14h30 je commence à fumer bleu. Ce qui devait arriver, arrive, le joint de culasse est à changer. J’annonce à Florent que je  rentre au stand pour me refaire une santé. Il me propose de me masser les jambes, mais celles-ci vont bien, c’est une fatigue générale. Je mets mon timer sur 30 minutes et m’allonge en me couvrant.  Impossible de m’endormir. Je commence à trembler et avoir froid. J’avais eu les mêmes symptômes à l’arrivée de l’UTMB et cela n’avait fait qu’empirer pendant plus de 2 heures. Je me dis : « si tu restes comme cela tu ne repars plus. » Après une vingtaine de minutes d’arrêt j’enfile  un coupe vent et reprends la course tout frigorifié et tremblant. Au bout de moins d’un tour cela va mieux et je laisse le coupe vent pour rester en teeshirt. Les tours continuent à s’enchainer et Florent et toujours présent pour me donner soupe, pâtes et même de l’aspirine. Je ne suis pas très bien mais je gère. Les 2 premiers semblent  intouchables mais bon nombre de coureurs sont à l’arrêt ou marchent. Je me dis que je dois tenir et que la forme reviendra. Je cours un peu avec Philippe Warembourg qui me dit que l’on a tous des passages à vide. Oui mais, lui son passage à vide est passé et il finira premier avec une course gérée comme un chef. Pour info il y a 2 ans il a fini 6éme aux championnats du monde des 24h avec 238km.

La nuit s’éternise et Florent me prépare un tas de choses à mon ravito avant d’aller à son tour dormir un peu. Ma vitesse ne fait que baisser. Un peu plus de 5h du matin, je rentre une seconde fois au stand pour me refaire. Impossible de trouver le sommeil. Je reste allongé et après peut être 30 minutes d’arrêt je reprends, frigorifié, le circuit. Impossible de courir. Les Jambes ne répondent plus. Je marche pendant presque un demi-tour puis arrive à trottiner. L’objectif, continuer, ne plus s’arrêter. Putain quand est ce que le jour va se lever. Cela me redonnera un peu plus la patate. Alain a dit qu’il reviendrait vers 7h. Le temps ne passe pas. A chaque sortie de l’anneau de vitesse j’accélère dans le virage dans l’espoir de voir Alain…Non pas cette fois,  Ca y il est arrivé. Sa seule présence me réconforte. Il est vraiment aux petits soins pour moi. Le moral est remonté. Fred Laugier qui était sur le parcours la veille est revenu ce matin avant de faire Bresson. J’ai envie de voir Joséphine et les enfants mais j’espère qu’ils ne viendront pas. Je sais que mon épouse n’aime pas me voir cuit. Sa présence me réconforterait mais l’envie de ne pas la voir s’inquiéter pour moi est plus fort.

Denis et Fabrice sont également de la fête. Ils m’accompagnent pendant quelques tours. Je leurs dis « arrivé à 200 tours j’arrête». Mine de rien, leur présence me fait accélérer. Agnès est également venue m’encourager.

Mon objectif faire 200 tours est  dans la poche et sur ma lancée j’en fais un peu plus. A 15 minutes de la fin on nous donne un témoin avec notre N° de dossard.  Une minute avant la fin un coup de pistolet sera donné. Il faudra laisser le témoin à l’endroit où l’on sera au second coup de pistolet indiquant la fin des 24 heures.

Le premier Pan retentit, je passe devant la ligne de  départ et continue tel un bolide à près de  9 km/h. J’ai presque les larmes aux yeux j’ai passé les 204 tours cela doit faire plus de 212 km. PAN je laisse tomber mon témoin et continue pour tomber, 50 mètres plus loin, dans les bras d’Alain que j’étreins. Beaucoup d’émotion et je suis vidé. Alain me conduit jusque sur « mon   lit ». Je félicite Philippe qui a tenu jusqu’au bout. Je ne peux plus bouger. J’ai mal aux genoux, aux adducteurs. Les secouristes viendront s’occuper également de moi, me mettre de la glace sur les genoux. J’entends mon nom au Micro pour la remise des prix. Alain leur indique que je suis dans un mauvais état. Piero viendra me remettre ma coupe sur mon lit.

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Je reste allongé jusqu’à midi puis aidé de Carine, Marc et Alain je regagne ma voiture et rendre à la maison.

 

Après quelques jours les douleurs sont passées j’ai même repris l’entrainement. Cette Course m’a vraiment fait du bien pour affronter mes problèmes de santé. Pendant quelques jours ils n’ont pas été l’unique sujet à mon esprit. Au moment où je termine ma prose, je viens de sortir de l’hôpital. Les résultats ne sont pas encore définitifs mais sont très encourageants. Je n’en dirais pas plus sur mon séjour à l’hôpital.

Ce que je retiens de ces 24h.

C’est une expérience très intense car les amis, la famille, les collègues, les copains, les connaissances sont sur le parcours et cela vous donne la super patate. L’ambiance est très conviviale et les coureurs sont tous sympas.  Je suis prêt pour remettre le couvert l’an prochain avec une meilleure gestion de la vitesse dans le temps que celle de cette année.

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Cependant les 213,171 km effectués en 24h00 sont un résultat que je ne pensais vraiment pas atteindre 15 jours après avoir abandonné au 157eme km de la Spartathlon et 5 jours après avoir appris que j’avais un cancer.

Un grand merci à tous ceux qui sont venu nous voir, avec une mention spéciale aux 2 autres escargots de la course, une mention très spéciale pour Hubert, Florent et Alain.

 

Rendez vous les 1 et 2 Octobre 2011 au Parc MISTRAL

Publié dans Les Courses

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